Salut !
Première remarque : J'ai eu un devoir il y a quelque temps sur le style à partir d'une définition assez provocante de Jean Cocteau :
« Qu’est-ce que le style ? Pour bien des gens, une façon compliquée de dire des choses très simples. D’après nous : une façon très simple de dire des choses compliquées. »
Je vous laisse méditer

Bon, pour moi, ça rappelle de mauvais souvenirs mais c'est pas le sujet
Si on y réfléchit, le style est en fait l'une des thématiques les plus compliquées de la critique littéraire et je serais tenté de dire comme plumedargent qu'en vérité on ne sait pas trop ce que c'est

( d'où ma difficulté à disserter sur un sujet que je considère extérieur à la critique littéraire : laissez le style tranquille ! )
Mais il me semble qu'en prenant en compte les points de vue et les différentes perspectives sur la question en peut se faire sa propre idée de ce qu'esr cette mystérieuse chose.
Je me demandais donc, en quelque sorte, ce qui départage le style, de la faute de goût et du mauvais français ?
Faute de goût --> jugement subjectif du lecteur ou du critique. On peut dire d'un style qu'il est mauvais. On rejette donc la façon qu'a l'auteur de s'exprimer, de mettre en mots ce qu'il pense selon des critères esthétiques personnels.
Le mauvais français, lui, c'est le mauvais usage de la langue française dont des règles ont été définies au cours des siècles. Certes, on peut remettre en question certaines d'entre elles. Mais ne pas oublier qu'une langue sans grammaire, conjugaison, et toutes ces règles qui paraissent inutiles, eh bien... ce n'est rien.
Je pense que le style est la direction que tu donnes à ton écriture, c'est ce qui va sous-tendre une idée, donner une ambiance au-delà des mots, au-delà de ce qui est exprimé. Pour moi le style représente l’âme que met l'écrivain dans son écrit, ça ne doit pas (trop) être une fin en soi. Partant de là, tout est permis, après ça plait ou pas ...
Je suis plutôt d'accord avec toi, même si ça reste très vague : qu'est-ce que l'âme ?

Ta remarque, MrFlo, m'a fait penser aux travaux de Herder sur la relation entre le
Volk, dont l'âme s'exprime dans sa langue ( en l'occurrence, l'allemand, confronté au français, langue des élites et de l'universalisme des Lumières ), et cette âme représentant la nation allemande. Voilà, c'est comme si en littérature on retrouvait à l'échelle de l'auteur cette théorie ^^
Et puis on peut choisir d'écrire pour le style, non ? Certes, ça paraît très spécial, "intellectuel

", mais ça reste une possibilité, dans laquelle tu porteras toute ton attention dans le traitement de la langue, dans l'expression, dans le rapport qu'on a avec les mots. Et il y a moyen de se faire plaisir aussi je pense

Pour mes anciens profs de français, calamité, damnation! Alors qu'en fait c'était son propre style et il a vendu énormément de livres.
Oui, enfin est-ce que le succès de l'auteur est dû à son style ? Je veux dire : est-ce que c'est parce que tu as vendu beaucoup de livres que ton style est beau, maîtrisé, et que tu possèdes des qualités d'écriture ?
Le style vient de la façon naturelle de penser, ordonnée en phrases construites. On part donc de sa pensée naturelle, qui elle part dans tous les sens, et on l'oriente dans une direction choisie : une façon de penser et donc de mettre ses pensées en phrases, suivant les règles de la grammaire, de la syntaxe et de la ponctuation.
Donc le style, c'est la canalisation de l'expression spontanée de notre pensée dans une forme écrite particulière. Ça relève donc d'un travail d'écriture, c'est artificiel, non ?
Mais du coup de ce que dit ReineDeFeu est problématique :
Le style commence au premier jet, et plus tu retravailles ton texte, plus tu "dénatures" ton style. Ça correspond à l'idée que "plus on est talentueux, moins on a besoin de (re)travailler pour produire un beau résultat".
Très contestable. Je t'invite à voir les brouillons de Flaubert ( consultables sur le net ) ou de Céline.
Flaubert ne cache pas qu'il "dénature", comme tu dis, volontairement son "style" naturel. Le "réaliste" qu'on connaît est donc une création. Flaubert bride complètement son penchant romantique pour inventer un autre style qui est complètement opposé.
Pour Céline, tu as l'impression que c'est une transposition d'une langue orale sur un support écrit alors qu'en fait, c'est une énorme tricherie

: il a passé des heures à sélectionner les mots de l'argot, de la langue populaire et à recréer un langage. Et tu te rends compte que lire à voix haute du Céline, c'est aussi difficile voire davantage que lire n'importe quel autre auteur.
Même en poésie, le premier jet est rarement le dernier. Tu l'as compris, je suis plutôt du côté du style comme travail d'écriture, et non comme expression spontanée d'un génie.
