L'importance des dialogues dans le récit

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Conqueror
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L'importance des dialogues dans le récit

Message par Conqueror »

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Salut !
J'ai regardé une vidéo de superflame, dont le lien est ci-dessus, et je vous recommande de la visionner si la thématique du dialogue vous intéresse. Pour la faire courte et tel que je l'ai compris, il explique qu'une histoire peut presque tenir seulement grâce à des dialogues, tout en conservant un environnement avec des détails. Les dialogues peuvent en effet cacher de nombreux secrets, informer sur la personnalité des personnages, leurs occupations, leurs relations, leur physique et leur mode de pensées. Ils peuvent aussi introduire l'environnement, l'élément du décor de manière indirecte, instaurer une ambiance, une atmosphère. Aussi, quelle est l'importance des dialogues dans un récit ? Où les placer, quelles proportions peuvent-ils occuper dans le script, et varient-ils selon le genre ?

En effet, il semble parfois complexe de mettre des dialogues à toutes les scènes. Comment faire, dans un environnement sans organisme doué de vocabulaire compréhensible ? Ou lorsqu'un personnage est seul, si ce n'est pas un monologue ? Comment décrire un paysage, une atmosphère, les vastes steppes gelées où personne ne parle ?
Est-ce intéressant dès lors de concentrer l'ensemble des dialogues dans certaines scènes, et uniquement des descriptions dans d'autres ?

Par ailleurs, quelle est l'importance des dialogues dans la captation du lecteur pour l'histoire ? Par exemple, un lecteur peut-il être davantage intéressé par les dialogues que par la description ? La description accompagnant les dialogues n'est-elle pas souvent secondaires, facultatives et pouvant être ignorée, exceptée dans des cas particuliers ?

C'est ainsi que j'ouvre ce sujet et débat sur les dialogues, leur importance, leur utilité, la place stratégique qu'ils occupent dans le récit et comment les répartir de manière optimal pour capter constamment l'attention du lecteur et le passionner dans sa lecture ?

N'hésitez pas à rajouter vos propres problématiques sur ce sujet afin d'enrichir ces échanges, bien à vous.

Conqueror
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Chamane
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Re: L'importance des dialogues dans le récit

Message par Chamane »

Merci Conqueror pour l'ouverture de ce sujet. <3

Je suis bien en peine pour répondre techniquement aux multiples questions que tu évoques, par manque de culture littéraire.
Je ne connais rien à la théorie. J'écris à l'instinct.
Toutefois, je fais en même temps très attention au "feng-shui" du récit, aux proportions, au dosage, à l'harmonie, au rythme, aux sonorités, aux enchaînements. Pas d'une façon consciente, mais je sens quand ça ne me va pas. C'est physique. Comme une fausse note dans un accord. Alors je cherche une autre manière d'écrire la scène, l'action, la réplique, jusqu'à ce que je sente l'harmonie.

Comme j'écris souvent en mode subjectif (à la 1e personne du singulier, et au présent de préférence), mes textes ne sont la plupart du temps qu'une alternance de perceptions du personnage que l'on suit, de ses pensées et de dialogues qu'il entretient. On n'est ni dans la nature morte ni dans la description, mais dans la vie perçue par le personnage.

Souvent, mes dialogues servent à introduire un contexte, à préparer une action à venir, à révéler un indice, mais sans en avoir l'air. On trouvera peu d'éléments descriptifs dans mes textes, et encore moins de paragraphe descriptif. Hormis les situations où un besoin vital de clarté se manifeste, je préfère laisser les rênes à l'imagination du lecteur. Je tisse des flux, je tresse, je natte, mais n'impose que rarement (enfin je crois).

Comment faire, dans un environnement sans organisme doué de vocabulaire compréhensible ? > Un dialogue ne semble pas vraiment pertinent ici.
S'il y a un témoin physique d'un langage inintelligible, j'évoquerais ses perceptions dudit langage (guttural, musical, rythmique, etc.), à quoi il le rattache ("ça ressemblait à du tibétain en sachet"), les impressions qui s'en dégagent ("je n'avais pas besoin de comprendre pour bien sentir la menace voilée dans le ton employé").
S'il n'y a pas de témoin physique de ce langage, on peut se reposer sur le narrateur par exemple, en tant que témoin immatériel.
S'il n'y a pas de témoin et qu'il n'y en aura jamais (les aventures d'un alien), on traduit pour le lecteur.

[Comment faire] lorsqu'un personnage est seul, si ce n'est pas un monologue ? > idem. Le dialogue n'est alors pas pertinent, faute de combattant. Donc monologue, ou "dialogue" dans la tête du personnage entre deux parties de sa personnalité (la bonne conscience et le petit démon, par exemple)

Comment décrire un paysage, une atmosphère, les vastes steppes gelées où personne ne parle ? > S'il n'y a strictement aucun témoin, quel intérêt de décrire ces éléments ? Je suis partisane (mais c'est un choix d'auteure), de ne jamais décrire – ou en tout cas le moins possible – ce qui n'est pas accessible. Ce n'est pas sans conséquences. Car en effet, des événements lointains peuvent avoir une influence sur le quotidien d'un personnage. Si le personnage subit ces changement sans s'interroger (libre à lui), alors je n'en dis pas plus. Mais je m'arrange pour faire comprendre l'élément lointain au travers de ses effets sur le quotidien du personnage. Si le personnage s'interroge, alors je place dans ses pensées, ses recherches sur le sujet, des éléments de l'événement lointain. S'ils sont plusieurs personnages, ces éléments vont ressortir au travers des dialogues entre eux, par des hypothèses formulées, des rumeurs entendues, etc.

Est-ce intéressant dès lors de concentrer l'ensemble des dialogues dans certaines scènes, et uniquement des descriptions dans d'autres ? > Je trouve cela casse gueule, car le changement de rythme, s'il n'est pas maîtrisé, peut provoquer un décrochage. En revanche, rien n'interdit par exemple de ponctuer une scène d'action purement décrite, par un dialogue lénifiant permettant le retour au calme, ou à l'inverse, une description douce, tranquille, contrastant avec un dialogue violent qui suit. L'important est de vouloir l'effet, et de maîtriser le contraste pour mettre en valeur ce que l'on veut.

Par ailleurs, quelle est l'importance des dialogues dans la captation du lecteur pour l'histoire ? Par exemple, un lecteur peut-il être davantage intéressé par les dialogues que par la description ? > Aucune idée / Probablement oui.

La description accompagnant les dialogues n'est-elle pas souvent secondaires, facultatives et pouvant être ignorée, exceptée dans des cas particuliers ? > Pas pour moi. Je déteste cordialement les verbes de dialogue, car je trouve qu'ils confèrent une certaine artificialité au texte. Si je m'immerge dans un personnage, que je l'incarne vraiment, je n'entends pas de verbes de dialogue. Leur présence constitue donc pour moi une sorte de poison à l'immersion. Dès lors, je me sers des descriptions concomitantes aux dialogues pour gérer les changements de caméra et introduire du réalisme dans le dialogue. On ne parle pas sans avoir des expressions de visage, des gestes réflexes, des tics. On ne parle pas sans qu'il se passe quelque chose autour, dont on va avoir au moins confusément conscience et qui va influer sur le fil des pensées.
Je me sers de ces courtes descriptions pour décrire l'air de rien mes personnages, leur comportement, leur gêne, ce qui les met à l'aise/mal à l'aise, bref, leur personnalité.
Exemple :
Plutôt que :
— Alors, comment vas-tu ce matin ? s'enquit Jean-Max, plein de sollicitude.
— Pas trop mal, mentit Gudule, encore vexée qu'on se soit moquée de son prénom.
J'écrirais
Jean-Max aperçoit Gudule. À la tête qu'elle fait, il comprend immédiatement qu'on s'est encore moqué de son prénom. Il s'approche d'elle. Il déteste l'attitude de ses collègues et veut clairement montrer qu'il ne hurle pas avec les loups.
— Alors, comment vas-tu ce matin ?
L'espace d'un quart de seconde, Gudule semble hésiter. Peut-elle vraiment lui faire confiance ? Elle pèse, soupèse, encore humiliée par ce qui vient de se passer, et prend une décision inconsciente.
— Pas trop mal.


Certes, la situation ici n'était guère confuse, puisqu'il n'y avait que deux locuteurs, mais s'il y en avait eu plusieurs, le passage de micro était assuré sans anicroche ni verbe de dialogue.
En toute chose, en tout lieu, à chaque instant, j'apprends.

Sarah Lywandael sur GoodReads, Babelio, Booknode, Étherval
Nouvelles publiées : Partenaires, toujours (Nova Natura, éd. L'Imagin'Arche), Myriam (éd. Réticule), Clouds (Étherval, n°21, éd. Les plumes de l'Imaginaire)
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