La question est :
Peut-on écrire en ressentant l'histoire au niveau émotionnel comme le lecteur qui la lit ensuite ou comme si elle était projetée sur un écran de cinéma ?
Et du même coup :
Est-il nécessaire d'écrire en ressentant exactement toutes les émotions, et en voyant les images de ses scènes avec la netteté d'un film ?
En écrivant, on n'arrive pas à vivre en intégral son histoire comme si on la vivait en réalité pour de vrai. Normal puisque l'imagination et la réalité sont deux dimensions différentes.
L'imagination cerne les grandes lignes, parfois avec des flashes plus ou moins nets, mais dans l'ensemble elle reste dans le flou. Il y a juste les mots pour se raccrocher comme des bouées de sauvetage.
Si l'écrivain est dans ce cas, le lecteur aussi. Il va matérialiser les scènes avec plus ou moins de netteté, souvent moins, mais suffisamment pour avoir un fil conducteur qui le maintient à la surface de l'histoire et à travers elle.
Je pense qu'il ne faut pas trop se soucier de ne pas vivre totalement son histoire comme un film projeté sur un écran, à 100%. L'essentiel réside dans les mots que l'on emploie et qui vont former des phrases, qui elles se caleront dans des paragraphes, qui composeront les scènes et les chapitres.
Après, en relisant, on peut savourer le résultat, se laisser porter et emporter par le rythme et la dynamique. Des fois ce sera un passage qui nous enveloppera de sensations et d'émotions, des fois un autre.
Une histoire combine des moments majeurs qui attirent plus, et des moments mineurs que l'on passe de façon neutre, et qui sont là juste pour relier des parties dans lesquelles la "vie de l'histoire" est plus forte et active.
En fait c'est comme dans la vie de tous les jours, dans une journée, on a une majorité de moments sans émotions particulières, et d'autres, que l'on peut compter sur les doigts d'une main des fois, et qui nous touchent vraiment.
On peut dire qu'on écrit comme on vit au quotidien. Et ce n'est pas plus mal, car si on avait des émotions en permanence, et des émotions fortes, on ne survivrait pas.